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Mardi 10 octobre 2023, l’hémicycle de l’Assemblée nationale a été le théâtre de l’adoption d’un texte législatif majeur concernant le plein emploi, texte précédemment entériné par le Sénat le 11 juillet. Les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA) seront désormais tenus de s’engager dans une activité sociale. Cela aura des conséquences non négligeables pour les résidents des territoires d’Outre-mer qui dépendent de ces ressources pour survivre, alors qu’ils pâtissent d’un manque sévère d’emplois stables et durables.
Le gouvernement imagine un retour au plein emploi
Veillant à apaiser les inquiétudes du public, Olivier Dussopt, le ministre du Travail, a voulu préciser, la veille du vote de ce texte nommé « Plein emploi », sur le plateau de Public Sénat, que le concept d’activité ne se résume pas strictement à un travail rémunéré. Des engagements sociaux bénévoles seront également considérés pour l’obtention et le maintien du RSA.
Le gouvernement, selon ses dires, souhaite ardemment faciliter le parcours menant à une réinsertion professionnelle pour ceux ayant été éloignés du marché du travail à cause du chômage ou de circonstances de vie difficiles – accouchement, maladie, accident, handicap,
Dussopt est fermement convaincu qu’en s’investissant dans une activité dédiée à autrui, ceux qui sont à la marge du marché du travail pourront retrouver une place. Un quota de 15 heures de travail ou d’activité sera exigé des bénéficiaires du RSA. Cette mesure, promesse de la campagne du président Emmanuel Macron, repose sur le précepte que « personne n’est inemployable », selon l’expression du ministre.
Des objectifs difficile à atteindre en Martinique
Cependant, cet objectif pourrait être difficile à atteindre. Prenez la Martinique, où presque 40 000 foyers sont allocataires. La majorité des bénéficiaires sont des personnes âgées, 40 % ayant plus de 59 ans, comparativement à 26 % en France métropolitaine. Des pourcentages similaires sont observés dans d’autres territoires d’Outre-mer, où le chômage affecte surtout les plus jeunes et les plus âgés.
Le montant du RSA varie de 607 euros pour un individu sans enfant à 1 337 euros pour une personne avec trois enfants. Mais combien d’allocataires auraient préféré travailler pour un salaire décent ? Le véritable défi réside dans la création d’emplois pour toutes qualifications.
C’est cette problématique qui a été soulignée par nos députés. Jean-Philippe Nilor a assimilé l’échange entre contrat de travail et aide sociale à du chantage. Johnny Hajjar, quant à lui, estime que personne ne choisit volontairement de vivre du RSA. Il va de soi qu’ils ont voté contre ce texte, tout comme Marcellin Nadeau, Jiovanny William et la majorité des députés d’Outre-mer. Il y a trois mois, les sénateurs de Martinique, Maurice Antiste et Catherine Conconne, ont défendu la même position.
Aucun plan du gouvernement n’a encore fonctionné
Si l’État avait un plan de lutte contre le chômage de masse et pour le plein emploi dans les territoires d’outre-mer, cela se serait vu. Malgré le potentiel des travailleurs et les besoins de la population, c’est l’orientation vers une dépendance économique externe qui est privilégiée depuis toujours.
Notre industrie attend toujours le soutien qui lui permettrait de satisfaire le marché local. Au lieu de cela, nos usines sont continuellement menacées par les importations massives. De plus, les industriels sont préoccupés par une réforme de l’octroi de mer qui pourrait fragiliser leur position sur le marché domestique.
Dans ce contexte, promouvoir l’emploi est un véritable défi. Aucun plan conçu à Paris n’a permis jusqu’à présent de sortir du sous-développement chronique que nous subissons. De même, maintenir les allocataires du RSA dans leur dépendance à l’aide sociale semble plus facile que de leur offrir la chance de retrouver ou d’acquérir leur dignité par le travail.
Il semble une fois de plus que le gouvernement et sa majorité fluctuante n’ont pas saisi la réalité de la situation des territoires d’Outre-mer.